En temps particulier, article original exige. Malgré le fait que l’on soit bloqué dans son canapé, à divaguer entre la télé, la cuisine et la terrasse (pour les plus chanceux), je vous propose aujourd’hui de voyager, malgré tout, via le Progressif comme moyen de locomotion.
A commencer par quelques lignes historiques. Pour se saisir des origines du mouvement, le Rock Progressif, il faut retourner au milieu des 60s’ lorsque de nouvelles formes d’expression artistique ont émergé. Pour les musiciens, jouer et écouter de la musique sous l’influence de psychotropes comme le LSD démultipliait le champ des possibles de la création sonore. Le Rock Progressif nous vient tout droit du mouvement psychédélique, s’inscrivant dans les mêmes volontés artistiques en insistant plus fermement sur la performance et la recherche musicale. Les artistes cherchant à repousser leurs limites créatives, associés aux revendications du mouvement hippies, de nouvelles formes de productions commencent à voir le jour. Des triples albums, des morceaux de plus en plus longs.
L’album enregistré a plus d’importance, et cela élève le rock au rang des formes artistiques intellectuelles et sérieuses. L’appréciation de cette musique devient plus privée et contemplative grâce à ces disques qu’on écoute désormais dans leur intégralité. Un mouvement qui par sa recherche et la contemplation de son public, a su s’exporter à travers le monde. L’intérêt d’un courant comme celui-ci est qu’il est facile de laisser exprimer sa totale créativité. Dans le contexte d’un tour du monde, il prend de multiples formes en s’accommodant souvent à la culture de chaque pays dans lequel il émerge.
Grand départ : notre playlist « tour du monde »
1 . Allons en Allemagne pour découvrir le prog/krautrock. Le progressif est les plus souvent abordé de façon électronique à l’aide de synthétiseurs et de machines (sans y laisser les principales volontés et constructions du progressif). La scène progressive allemande est réputée comme riche notamment en terme de nuances et multitude d’artistes (Can, Cluster, Faust, Klaus Schulze). Plus tard, des artistes (Klaus Schulze et Tangerine Dream) créent l’ambient sous les mêmes inspirations que le prog. Pour offrir un échantillon des plus représentatifs, je vous laisse (re)découvrir les célèbres Kraftwerk.
- Rentrons à la maison pour s’imprégner du prog Français ; le mouvement débarque très tôt grâce aux groupes Ange et Magma (1969, un an après l’appellation officielle). Ange se rapproche du progressif comme nous l’entendons, celui de des Floyd ou de Crimson tandis que Magma innove en matière de prog et crée un mouvement qui gravite autour du progressif en y ajoutant des inventions toutes aussi étonnantes les unes que les autres ; le zeuhl (mémorise tous les sons existants dans la profondeur de nos esprits). Le groupe, qui continue de tourner aujourd’hui, a même créé sa propre langue : le cobayen et son mentor Christian Vander s’apparente à un gourou derrière son immense batterie.
- Petit tour chez nos confrères italiens ; au même titre que la France, la scène italienne côtoie le progressif dans les années 70. La spécificité de celui-ci est qu’il se rapproche du rock symphonique italien, soit, on pourra y entendre plus évidemment les influences de la musique classique, propre à l’histoire musicale du pays, baignant dans les multiples opéras des plus grands compositeurs du monde. Un groupe progressif italien : Premiata Forneria Marconi, qui dans son album Per un amico met en premier plan la flûte traversière, le violon ou encore le clavecin, le tout accompagné du progressif classique en cassant les rythmes et en recherche d’expérimentation toujours plus originales. Les paroles chantées (mais toujours peu mises en avant, propre au courant associé) sont en italien. On l’appelle le progressif symphonique.
- En Hollande : Le prog connaît également un franc succès, où les groupes adhèrent plutôt à la branche hard-rock du rock progressif. Par exemple, les groupes Focus ou Supersister retranscrivent leurs influences grâce de nombreux albums tous influencés par le hard rock, la symphonie ainsi que le psychédélique. Des codes familiers et récurrents à travers les pays. Le morceau extrait de la playlist se rapproche autant du hardrock et du psychédélique, un mélange homogène et qui laisse facilement lire les origines du mouvement.
- Grèce ; Parenthèse très personnelle sur le groupe Aphrodit’s Child qui sort tout d’abord deux albums très psychédéliques. Ces deux premiers rencontrent un franc succès, considéré comme le commercial grec. Le groupe sort ensuite l’album 666 qui quant à lui, connaît un flop et est beaucoup moins apprécié du public grec. A se faire une idée, le prog grec respecte moins les longues expérimentations, comme dans le morceau que nous allons écouter (The four horsemen) où l’on distingue deux phases bien définies qui s’alternent sur un schéma symétrique. Les rythmes et expérimentations sonores (en intro) sont quant à eux respectés mais nous sommes loin des morceaux de 20min où un vrai parcours musical est mené. Petit clin au leader du groupe Demis Roussos qui connaîtra, plus tard, ensuite un franc succès en chanson française.
- Pour clore cette playlist, nous allons au plus lointain, le Japon ; il est important de noter la vague de prog japonais qui a su s’exporter à travers le monde. Malgré sa situation géographique, les influences prog ont clairement touché la culture musicale du Japon. A tel point que l’on peut aujourd’hui, en retrouver en openning de certains animés. Le progressif japonais s’apparente à la fois au symphonique, à la recherche d’harmonies et de mariage parfait entre les instruments mais également, de technique et de dextérité dans la composition et les lives des musiciens. On voyage très clairement tout en retrouvant des points de repères communs a tous les progressifs que l’on a pu croiser lors de cette playlist.